Stations d’épuration, un dispositif efficace pour une gestion rationnelle de l’eau
S’il n’y a pas d’eau, il n’y aura pas d’eaux usées. Cependant, les eaux usées n’ont jamais été une préoccupation et une hantise des pouvoirs publics des pays sous développés, encore moins de leurs collectivités locales, à cause des lourds investissements qu’exigent les projets d’assainissement. Mais, plusieurs étapes ont jalonné le sillage historique de l’eau propre et de l’eau polluée au Maroc.
Alors, passer d’une politique de traitement-rejet à une autre de traitement-réutilisation des eaux usées, le gouvernement marocain est aujourd’hui conscient de l’ampleur du problème lié au stress hydrique.
Ainsi, la réutilisation des eaux usées est la voie majestueuse vers la préservation de cette denrée rare, qui est l’eau.
L’eau : une ressource naturelle de nécessité pour toute vie
L’eau est évoquée dans le Coran comme étant source de toute vie : « Nous avons tiré toute matière vivante de l’eau » (s. 21, v. 30).
Le rapport eau-vie n’est pas à démontrer aujourd’hui ou à en arguer. C’est une vérité qui est prouvée par la science et par la réalité vécue.
Seulement, il y a lieu de faire observer avec amertume et tristesse que cette matière de la nature indispensable à l’existence de l’espèce humaine, animale et aussi végétale, est méprisée par l’être humain. Celui-ci, une fois lui manque, sa langue devient blanche et sort de sa bouche. Assoiffé, il commence à chercher une source d’eau pour se désaltérer. Quel paradoxe !
Devant cette situation paradoxale, les décideurs marocains prennent, au fil des années, des décisions irréfutables et incontestables dans le but d’abord de conserver cette matière vitale, ensuite de sensibiliser pour une utilisation rationnelle, intelligible et consciencieuse et enfin de réutiliser les eaux usées à travers l’installation des stations d’épuration.
Les ressources naturelles en eau au Maroc sont menacées de raréfaction, voire même de disparition à l’instar d’autres pays dans le monde. En effet, nos réserves en ressources en eau naturelles sont évaluées à 22 milliards de m3 par an, soit l’équivalent de 750 m3 /habitant/an, qui est un indicateur de mauvais augure pour le Maroc, puisqu’il s’annonce en tant que seuil critique indiquant l’apparition de pénuries et de crise latente d’eau. Plus de la moitié de ces ressources sont concentrées dans les bassins du nord et le Sebou couvrant près de 7% du territoire national.
Lorsque la nature se met en colère, alors les catastrophes commencent à tomber en limitant les ressources en eau, dégradant sa qualité, augmentant la pollution de l’air, des océans et de cette matière naturelle vitale, voire indispensable à la vie, que ce soit humaine, animale ou végétale.
Mais, penser à ce terme magique qui a enrichi les dictionnaires des langues, qui est le recyclage. Celui-ci est devenu une solution inévitable : recycler tout ce qui est utilisé ou usé. Magique, n’est-ce pas ?
L’eau, cette denrée rare, elle aussi, est concernée par ce procédé scientifique où la chimie est en apothéose, lorsqu’elle se transforme en eaux usées.
Les eaux usées : un produit qui peut être utile
Déversées en abondance tout en serpentant la surface du sol ou évacuées à travers les égouts dans la mer, les eaux usées rendent la vie difficile à l’homme qui est à la quête d’un environnement sain et propre.
L’eau produit les eaux usées, sous forme d’eaux polluées ou infectées constituant indubitablement un péril et une détresse pour l’humanité. Sachant que l’activité humaine est de nature dévastatrice de l’environnement.
D’autant plus que les eaux usées domestiques, industrielles ou de ruissèlement menacent la santé des citoyens et polluent l’environnement, ce qui a poussé les pouvoirs publics marocains à trouver des solutions adéquates pour réutiliser les eaux usagées après leur traitement. C’est toute une stratégie que le gouvernement marocain a alors adopté pour rendre les eaux usées utiles et non une calamité pour la population. Mais, hélas l’objectif est très loin d’être atteint.
Il est à rappeler qu’un Programme National d’assainissement liquide et d’épuration des eaux Usées (PNA) a été lancé en 2005, conjointement par le Département de l’Environnement et le Ministère de l’Intérieur.
Alors, atteindre à la fois un taux de raccordement global au réseau d’assainissement en milieu urbain de 75% en 2016, de 80% en 2020 et de 100% en 2030 et un volume des eaux usées traitées de 50% en 2016, de 60% en 2020 et de 100% en 2030, tels étaient les objectifs du PNA, pour l’horizon 2020 et 2030.
Ainsi, les principaux impacts du PNA se matérialisent par l’amélioration des conditions sanitaires dans les communes concernées et l’amélioration environnementale des bassins hydrauliques. Les autres retombées sont le développement touristique et la création d’emplois en particulier dans l’ingénierie, le BTP et le tourisme.
Mais, il faut le dire : Il parait que la situation est alarmante puisque les décharges polluantes domestiques générées par les rejets urbains et ruraux, au Maroc, sont évaluées à environ 400.000 tonnes de matières oxydables.
D’autant plus que les volumes annuels des rejets des eaux usées des villes ont fortement augmenté au cours des dernières décennies. Ils sont passés de 48 à 506,2 Mm3/an entre 1960 et 2012. Une grande partie (61%) de ces volumes est déversée directement dans l’océan. Le reste (39%) est rejeté dans le réseau hydrographique ou directement dans le sol.
De même, les prévisions établies montrent que ces rejets continueront à croître rapidement pour atteindre 741 Mm3 /an à l’horizon 2030.
A en croire ces données et ces chiffres, le gouvernement marocain aura des difficultés pour maitriser le débordement des eaux usées dans les océans et sur le sol sans l’implication et de manière forte des élus qui gèrent le quotidien des citoyens marocains, citadins ou ruraux. Les élus portent la responsabilité certes politique, mais aussi civile, administrative et pénale. Ils sont appelés à œuvrer pour la création d’un cadre de vie agréable et vivable pour les citoyens en le préservant de toute menace de dégradation ou de détérioration.
Les stations d’épuration : De nouvelles STEP pour traitement et réutilisation des eaux usées
Avec la mise en œuvre du programme national d’assainissement liquide en 2006, le nombre des stations d’épuration fonctionnelles est passé de moins de 20 STEP à 75 STEP en Décembre 2012. Un résultat est certes en recrudescence, mais qui fait appel à plus de vigilance, de perspicacité et de clairvoyance.
Le taux d’épuration des eaux usées est passé de moins de 8% en 2005 à 34% en 2012. Les bassins de la Moulouya et du Tensift enregistrent un taux d’épuration supérieur à 90%. Ceci est du à l’épuration principalement des villes de Nador, Oujda, Essaouira et Marrakech.
A ajouter que le taux d’épuration des eaux usées est passé de 5 pc en 1999 à plus de 71 pc à fin 2016 grâce à 113 stations d’épuration des eaux usées (STEP) fonctionnelles.
Il est à rappeler que le PNA consiste en la réhabilitation et l’extension du réseau, le branchement et le renforcement du réseau pluvial et la réalisation des stations d’épuration (traitement primaire, secondaire, voire tertiaire) pour équiper 330 villes et centres urbains avec un total de plus de 10 millions d’habitants. Pour réaliser ces projets de nécessité, il va falloir trouver des investissements qui s’élèvent à un montant de 43 Milliards DH pour un délai de livraison fixé à 2020, tracés sur la base d’un scénario où les opérateurs contribuent à 70% et les 30% restants proviennent des subventions de l’Etat complétées par des apports des collectivités locales et des agences de bassin. C’était une réflexion qui date de 2005.
En 2012, la donne allait changer pour convenir de retenir un autre scénario de financement impliquant les opérateurs à financer la moitié de l’investissement et l’Etat l’autre moitié. Et l’ambition du PNA allait s’élargir pour hisser le niveau de son intervention et atteindre d’autres objectifs.
Ainsi le PNA actualisé vise, à l’horizon 2020, à hisser l’assainissement liquide au rang de priorité gouvernementale, rattraper le retard dans le domaine de l’assainissement et de l’épuration des eaux usées, atteindre un taux de raccordement global au réseau d’assainissement de 80% en milieu urbain, abattre la pollution engendrée par les eaux usées d’au moins 60% et améliorer le taux de la professionnalisation de la gestion du service.
Le coût global du PNA a été estimé à 43 Milliards DH pour équiper initialement 260 villes et centres abritant une population de 10 Millions d’habitants. Actuellement, la liste du PNA est élargie à plus de 383 villes et centres pour couvrir une population de 12 Millions d’habitants. A cet effet, un fonds d’assainissement liquide et d’épuration des eaux usées a été créé en 2007 pour le financement des projets d’assainissement liquide en partenariat avec les opérateurs concernés.
Depuis son lancement en 2006, le programme d’investissement a été réalisé au profit de 229 communes. L’investissement engagé à fin 2016 s’élèvent à près de 26,5 MMDHS.
Jusqu’à fin 2016, le PNA a permis de réaliser le taux d’épuration des eaux usées d’environ 45% en 2016 contre 7% en 2006 et un taux de raccordement d’environ 75% en 2016.
Le Maroc est en mesure de réussir le challenge de raccordement aux égouts pour les eaux usées et de branchement aux canalisations pour l’eau potable au profit de toutes les agglomérations urbaines ou rurales.
Au niveau rural, le Royaume du Maroc a déjà réussi de relever avec compétence et efficacité un autre défi qui est le Programme d’électrification rurale globale (PERG). Ce programme d’électrification par raccordement aux réseaux a permis à 2085273 foyers de 39015 villages de bénéficier de l’accès à l’électricité, (plus de 12,5 millions habitants). Ainsi le taux d’électrification rurale a atteint 99,13%.
Alors, pourquoi pas un programme similaire dans le domaine de l’évacuation maitrisée des eaux usées avec traitement et réutilisation dans le milieu rural ?
L’assainissement des eaux usées en milieu rural : une tentative gagnante
L’assainissement des eaux usées en milieu rural a pris un retard considérable à cause de nombreuses contraintes, aussi bien d’ordre national que local. Les eaux usées générées en milieu rural sont estimées à environ 500 000 m3/j, qui sont évacuées directement dans la nature, acheminées par gravité, infiltrées dans le sous-sol ou utilisés pour l’irrigation de petites parcelles si elles existent.
Leur impact sur la nappe souterraine et sur les cours d’eau est certes réduit en raison notamment des faibles teneurs en produits chimiques dangereux (absence de rejets industriels en milieu rural) mais au niveau sanitaire, les populations rurales sont fortement exposées aux maladies d’origine hydrique.
Il y a lieu de bénéficier d’autres expériences réalisées ici et là dans le monde et opter pour la meilleure solution permettant à nos douars et à nos agglomération rurales de jouir d’une vie saine protégée contre les bactéries et les maladies hydriques.
Après la réussite du programme national d’assainissement liquide et d’épuration des eaux usées, le Maroc cherche à mettre en œuvre un programme national d’assainissement rural (PNAR).
Il existe en fait différents procédés pour évacuer les eaux usées dans le milieu rural, notamment le raccordement à un système de canalisation existant, le stockage puis le transport et l’épuration sur place.
Lors de l’assainissement des eaux usées, le raccordement à la canalisation publique doit par principe être examiné en première priorité. Il est même obligatoire dans les zones à bâtir, ainsi que dans celles où il peut être considéré comme opportun et raisonnable. Une grande variété de système de conduites et de pompes peut être mise en œuvre dans cette situation.
Si le raccordement à la canalisation n’est pas raisonnable, il est alors nécessaire de recourir à une solution conforme à l’état de la technique. Les eaux usées peuvent être stockées sur place, puis transportées dans une station d’épuration communale, ou être directement traitées dans une petite installation d’épuration mécano-biologique.
Dans d’autres pays, notamment en Europe, plusieurs centaines d’installations utilisent différents systèmes techniques ou semi naturels de traitement. Les dimensions et le procédé dépendent de différents facteurs, tels que la charge à traiter, la disponibilité énergétique, le climat, la place à disposition. En outre, des recherches intensives sont menées sur de nouveaux systèmes alternatifs, notamment pour la collecte et le traitement séparé des différents flux d’eaux usées (urine, matières fécales, eaux grises).
Des expériences dont le Maroc peut bénéficier pour protéger la santé des habitants des douars et des montagnes.
Eau : Contexte mondial
L’intérêt accordé à l’eau et à son utilisation dépassent les frontières et se concentrent au niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies qui a adopté, le 22 décembre 1992, la résolution A/RES/47/193, en déclarant le 22 mars de chaque année «Journée mondiale de l’eau», à compter de l’année 1993, conformément aux recommandations de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED).
D’autant plus qu’il existe aujourd’hui un conseil mondial de l’eau qui est une collaboration internationale d’ONG, de gouvernements et d’organisations internationales pour résoudre les problèmes liés à l’eau dans le monde.
Fondé en 1996 dont le siège est à Marseille, ce conseil regroupe en 2013 plus de 350 organisations à travers 50 pays.
Le Conseil mondial de l’eau catalyse l’action collective pendant et entre chaque Forum mondial de l’eau, le plus grand événement international sur l’eau. Organisé tous les trois ans en collaboration avec un pays hôte, le Forum offre une plate-forme unique où la communauté de l’eau et les décideurs clés peuvent collaborer et établir des plans d’action à long terme sur les défis de l’eau autour du monde. Le Forum réunit des participants de tous les niveaux et domaines, y compris la politique, les institutions multilatérales, les milieux universitaires, la société civile et le secteur privé. Au fil des années, le nombre de personnes participant au Forum est passé de quelques centaines à des dizaines de milliers de représentants de la communauté internationale et des pays hôtes. S’appuyant sur cette dynamique, le Conseil vous encourage à rejoindre les efforts du Forum et à renforcer la capacité du monde entier à répondre aux défis liés à l’eau de notre époque.
L’eau, ressource naturelle, est certes vitale et de grande valeur pour tout ce qui est vivant sur cette terre, mais malheureusement négligée et abandonnée à son sort.
Alors, perdre une goutte d’eau en vain constitue un acte de mauvais augure.
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